Cette communication étudie les représentations de l'exotisme et de l'esthétique balnéaires en croisant l'analyse critique de La mort à Venise de Thomas Mann et celle du film éponyme de Luchino Visconti. Figures littéraire et cinématographique s'entrecroisent et dialoguent ici pour décomposer et recomposer les formes d'une esthétique fin de siècle qui épuise et sature les représentations liées à la modalité de la plage, du bord de mer, mais aussi à la lente dilution des corps et des esprits dans une eau vénéneuse et sombre, à l'image des émotions troublées des protagonistes de ces deux récits. Dans cette tension dynamique s'opposent les eaux calmes et limpides bordant le Grand Hôtel des Bains sur l'île du Lido et l'opacité délétère des eaux empoisonnées de Venise. Ce sont elles qui deviennent les personnages principaux de l'œuvre de Mann et de Visconti, l'un comme l'autre transformant ces éléments de décor en allégorie de la lutte entre une espérance sans cesse différée et une décrépitude bientôt assumée. Prendre les eaux ici devient la métaphore d'un vain combat, celui par lequel toute chose s'abîme en son implacable devenir.